Orient&Orient

Un jour, je lirai Edward Saïd.

Month: June, 2014

#37

COREE -2-

Il y a plusieurs choses qui sont intéressantes ou amusantes en Corée. L’une d’entre elles est cette espèce de culture du « couple ». Au Japon, énormément de choses sont faites pour les personnes seules : le karaoké, les restaurants, etc. Par contre, si vous êtes seuls en Corée, gare au profond sentiment de solitude qui risque de vous assaillir.

Il suffit par exemple de considérer la taille des bingsu. Le bingsu est une version ++ du カキ氷 (kaki-gôri, glace pilée) japonais. Il est généralement surmonté d’une tonne et demi de fruits et de pâte de haricot rouge, donnant une montagne sucrée mettant à l’épreuve votre estomac. J’en ai mangé un avec Yonghyun et un avec Constance, et je peux vous assurer qu’il est tout à fait impossible de le finir seul. En dehors de cela, il est difficile d’aller manger un barbecue seul, tout comme il semblerait assez étrange d’aller au cinéma seul. Vous me direz, vous pouvez faire ça avec vos amis, sans vous prendre la tête. Mais les couples sont PARTOUT dans ce pays ! Et ils sont plus ou moins adorables, selon leur humeur.

Ainsi, nous avons pu assister à des jetetienslamaindanslarue, des bisous, des câlins, des « oppaaaaa » tonitruants, des petits mots doux, etc. Un jour, nous étions dans une station de métro, et soudainement le couple devant nous a décidé qu’il était l’heure de se faire un méga câlin. Une autre fois, nous étions en train de manger, et le couple à côté de nous a commencé à s’embrasser, mode ‘fire’ enclenché. Pourquoi pas. Nous avons également assisté à des scènes un peu moins sympathiques, avec des couples en crise. La première fois, nous étions dans ce même restaurant où le couple sur notre droite s’embrassait avec passion. De l’autre côté s’est assise une demoiselle qui ressemblait fort à Bom de par sa plasticité (au sens ‘plastique’ du terme). Elle a commencé à préparer les couverts, a commandé la viande et ce qui allait avec. Après 15min, toujours pas de petit ami. Elle a donc commencé à griller la viande dans son coin et a mangé la moitié du plat. Encore 15min, et toujours pas de petit ami. Un coup de fil finit par arriver alors qu’elle est en train de s’enfourner une plâtrée de piments (et tousse, parce que ouais, ça arrache). « Oppaaaaa, tu es où ? Devant *** ? C’est juste à côté alors ! Dépêche-toi de venir ! Je t’attends à ***. » Il faudra encore 30min à Oppaaaaa pour arriver jusque là, provoquant l’ire de la donzelle en détresse. A ce point du repas, elle avait fini les 3/4 de la viande et était en train de poignarder son bibimbab (yum) à coups de cuillère. Ce fut impressionnant. Personnellement, je n’aurais pas aimé être à la place du gars qui a du expliquer pourquoi il était si en retard. Un autre couple, croisé dans la rue, était aussi relativement surprenant. On marchait tranquillement quand tout à coup, on entend un bruit sourd. Un portable et un porte-monnaie était tombé par terre. Le propriétaire des objets les regardait d’un air abasourdi. C’est là qu’on s’est rendu compte que sa petite amie les avait sortis de son sac et les avait jetés par terre, avec rage, avant de s’éloigner à grands pas. Venant du Japon, c’était vraiment étrange de voir un couple se disputer en public. Le jeune homme a rattrapé sa demoiselle, lui a attrapé le poignet avant de la plaquer contre un arbre (ouuuh) et de tenter de s’expliquer. C’est hot, very hot, dans ce pays !

De manière plus générale, les Coréens sont bien meilleurs à exprimer leurs sentiments que les Japonais, même si cela peut surprendre et parfois agacer. Il n’y a pas de doute quant au fait que ce sont les Latins d’Asie. Ils sont assez impulsifs et directs. Parfois, ils le sont même un peu trop. Ils sont aussi bavards, posent des questions que l’on peut juger personnelle (venant du Japon), touchent les gens,…

Ce qui, personnellement, me déplaît le plus, est le fait que les vendeuses dans les boutiques vous collent. Elles sont à quelques centimètres de vous et regardent tous vos gestes. Elles vous proposent des produits qui iraient bien avec ceux que vous avez déjà choisis, vous posent des questions, vous font essayer mille choses. Ca pourrait être agréable, mais elles sont si insistantes que ça en devient pesant. Seulement, c’est difficile de leur dire que l’on n’a pas besoin d’aide poliment, surtout quand on ne parle pas la langue, et que la personne en face ne maîtrise pas vraiment l’anglais.

Bref, les Coréens sont des êtres surprenants, positivement. Ce fut un réel bol d’air que de pouvoir voir des gens rire, crier, se chamailler, s’amuser sans avoir besoin de faire attention au bruit qu’ils peuvent faire. Les gens sont plus spontanés, plus naturels (en dehors de la chirurgie plastique, haha), plus facilement abordables, même si les filles en couple font peur. J’aimerais bien que les Japonais s’ouvrent un peu, même si j’ai vu un nombre assez surprenant de couples se tenir par la main, chose assez peu fréquente auparavant. GO GO JAPAN !

#36

COREE -1-

Après un an et demi d’attente, j’ai posé mon premier pied sur le continent asiatique. Oui, je ne compte pas le Japon, puisque le Japon est un magnifique archipel, détaché du continent, les deux pieds dans l’eau, avec une mentalité d’insulaire. Bref. J’ai donc atterri avec émotion à l’aéroport international d’Incheon. Mais avant d’en arriver là, il faut dire qu’on a un peu souffert…

Tout commence à 6h du matin. Nous avions prévu de partir à 7h, il fallait donc se lever de bon heure pour tenter de ressembler à quelque chose et finir les bagages. 6h30, je n’entends rien du côté de ma colocataire italienne. Je toque donc à sa porte. Bingo, elle dormait encore. Elle se met donc doucement en marche. A 7h, je retourne toquer à sa porte, fin prête, ma micro-valise (j’ai fait des efforts) à la main. Elle passe la tête par la porte et me demande si on peut partir 15 minutes plus tard, le temps de s’épiler. Parce que tu t’épiles à 7h le matin, juste avant de prendre un avion ? Bon, pourquoi pas. Mais je commence à me sentir un peu fébrile. 7h15, toujours pas de Gio. Je lui dis donc que je vais passer au Family Mart acheter un petit déjeuner (pour ne pas mourir dans le bus) et un petit démaquillant. On se donne rendez-vous devant le combini. Quand je sors du Family Mart, toujours pas de Gio. Je commence à être sérieusement agacée et lui envoie un message disant que je vais recharger mon pass de transport et que je l’attends directement dans la station. Elle finit par arriver à 7h30 passés, m’expliquant qu’elle avait oublier de remettre son téléphone japonais sur vibreur. Je regarde l’heure et me dis que c’est cuit, le bus de 8h10 partira sans nous. Nous arrivons à la gare de Tokyo et nous perdons dans les souterrains. Naturellement. Donc oui, effectivement, pas de bus pour nous. Nous nous rabattons donc sur la solution « train ». Nous traversons intégralement la station pour tenter d’attraper le train de 8h15. Epic fail, again. Je m’accroupis sur le quai, en nage, avec l’envie irrépressible de hurler sur ma colocataire. Mais ce n’était pas fini ! Gio met la main dans son sac et se redresse soudain, l’air inquiète. « Je crois que je n’ai pas mon passeport… » Tu n’as pas QUOI ?! Ayant l’habitude de voyage au Japon, elle avait totalement perdu l’habitude de prendre son passeport et s’apprêtait à partir en Corée avec sa carte de résident. NO WAY. Je mets ma tête entre mes mains, exaspérée. On décide finalement que je prendrai le prochain train (Narita Express : 3,000y) pour arriver la première à l’aéroport et négocier un peu au guichet pour qu’ils attendent Gio. Gio attrape un taxi, prend son passeport, et arrive miraculeusement à monter dans le train suivant, qui l’a fait arriver à 9h56 à l’aéroport. Naturellement, l’enregistrement se termine à 9h55. Je supplie donc la dame au guichet d’attendre quelques minutes pour Gio. Elle me dit qu’elle fera son possible mais qu’elle ne peut rien promettre, et qu’en attendant, je dois passer la douane et aller attendre l’avion avec les autres. Au bout d’un moment, Gio ne répond plus à mes textos. Je ne sais plus trop quoi penser. Est-elle toujours en train de négocier ? A-t-elle passé la douane ? Doit-elle prendre le prochain avion ? Mais voilà Gio qui arrive, les joues rouges, en sueur, accompagnée de la petite dame du guichet qui lui a répété 3 fois qu’il faut qu’elle arrive plus tôt la prochaine fois.

Une fois assise dans l’avion (que ces avions sont petits !), je me rends compte que pour la première fois de ma vie, je vais dans un pays où je ne comprends pas vraiment la langue et où, surtout, je ne sais pas communiquer. C’est bien beau de comprendre les questions que l’on vous pose, encore faut-il savoir y répondre ! A l’atterrissage, je me mets donc à penser à toutes ces potentielles situations inconfortables où quelqu’un me parlerait et où je serais dans l’incapacité technique de répondre. Tétanisée.

L’aéroport, contrairement à ce qui était le cas il y a plusieurs dizaines d’années (selon mes parents), ne sent pas l’ail tant que ça. Il y a une vague odeur de kimchi qui traîne, mais sans plus. Incheon est propre et accueillant, bien que l’absence de washlet me rappelle que l’on ne se trouve plus au Japon. Nous attrapons le train qui nous mène directement à Hongdae et sortons par la fameuse sortie 9. Et là, c’est amusant. Les rues font un peu penser au Japon, mais en plus animé. Il y a des petits buibui, des vendeurs de rue, des étudiants qui chahutent, de la musique, des magasins,… Les odeurs de nourriture viennent nous ouvrir l’appétit tandis que nous tentons de nous orienter dans ce joyeux désordre. La guesthouse n’est pas bien loin, mais il faut gravir des rues escarpées. Il faut chaud et humide, comme toujours. Nous arrions en sueur (again) à la guesthouse, où la jeune femme qui nous accueille ne nous donne que les clés, sans vraiment nous expliquer le fonctionnement de la maison. La chambre est cependant propre, climatisée, avec des lits confortables (TRES important). Nous la partageons avec une Française et une Japonaise.

Nous décidons qu’avant toute chose, il faut prendre une douche. Alors, les douches, haha. C’est un grand carré, avec quatre douches séparées par des rideaux de douche. Si vous ne fermez pas ces rideaux, c’est une énorme douche publique. Pour les grands adeptes de l’intimitéquandjemelave, c’est assez moyen, mais on fera avec.

Une fois propre, nous repartons à l’aventure, pour découvrir le quartier. Hongdae est un quartier peuplé d’étudiants, avec des restaurants, des bars, des boutiques de vêtements, de cosmétiques et d’accessoires. Il y a des gens partout, qui discutent, boivent, jouent de la guitare, chantent, se chamaillent, etc. Ca a cet air cozy qui vous rassure lorsque vous arrivez dans un pays étranger et que vous plissez les yeux pour tenter de lire les enseignes. Notre balade nous mène dans la rue principale, où nous nous asseyons quelques minutes pour déguster un frozen yogurt (Okinawaaaaa). Après notre balade, nous retrouvons Constance pour aller dîner. Au menu : 떡볶이(ttokbokki), des morceaux de galette de riz et des légumes, des épices et une portion de ramen par dessus. Ca me pique le haut de la lèvre, mais j’accepte le défi ! Et mon estomac survit ! (J’ai des photos à l’appui, mais pour le moment, mon ordinateur étant mort, j’attends de recevoir mon nouveau bébé -gheu- pour uploader le tout). Après cela, nous nous dirigeons vers un bar pour boire une bière (Hoegarden représente) et finir notre journée en douceur. Tous ces événements ont naturellement eu raison de mon endurance et je me suis écroulée dans mon lit, oubliant tous les problèmes de sommeil que je pouvais avoir.

Et c’est ainsi que s’acheva mon premier jour au pays de la KPOP (racisme minimaliste). C’est d’ailleurs fort agréable de passer dans les rues et de pouvoir chanter du SHINee et du BigBang. La Corée a des airs de Japon mais s’en éloigne rapidement. Parfois, on est un peu dépaysagé, parfois pas. Il y a tant à raconter que je ne sais même pas par où commencer. Mais ça, ce sera pour un prochain épisode (wouhou) !

A la bonne vôtre, les enfants !

***

La Corée a Zoom Zoom My Heart Like A Loquette… ❤

#35

AIGUILLES

Voici venue la mousson japonaise. Nous sommes sous la pluie depuis une semaine et demi, c’est particulièrement désagréable. Vous me direz, aujourd’hui, nous avons du soleil. Ça fait du bien. Mais naturellement, il faut garder son parapluie sous le bras, parce qu’on ne sait jamais quand on va prendre une petite douche. J’ai eu la chance de voir des nuages annonciateurs (ambiance bison futé) en sortant de la maison et j’ai attrapé mon parapluie au passage, mais d’autres ont pris une sacrée saucée à la sortie du train. J’ai d’ailleurs investi dans un parapluie non-pliable. C’est certes moins pratique, mais la petitesse des parapluies féminins pliables japonais est déconcertante. C’est pour les enfants, dites ? Et non, je n’ai pas opté pour un parapluie transparent, le plus commun ici, parce que s’il y a bien UNE chose que les Japonais chapardent, ce sont les parapluies transparents. Vous entrez dans un magasin, laissez votre parapluie à l’entrée et, si c’est un endroit avec beaucoup de passage, vous avez un grand pourcentage de chance de ne pas le retrouver à la sortie. J’ai donc acheté un très joli parapluie vert-eau (pour changer), à motif et poignée dorée, bien féminin, pour éviter d’attirer les salarymen désemparés ou… un colocataire dans le besoin.

Bref, aujourd’hui, j’avais envie d’écrire quelques lignes concernant la ‘culture’ du massage au Japon. En France, on va généralement chez le kinésithérapeute (à vos souhaits) ou de plus en plus chez l’ostéopathe pour se faire remettre en place quelque articulation. Mais généralement, vous souffez déjà beaucoup quand vous y allez. D’autres vont dans des salons de massage, mais ça se divise généralement entre salons louches (mmh, massage thaïlandais vous dites ?) et plaisir de passer une heure dans une ambiance exotique, avec des huiles essentielles et de la musique orientalisante. Au Japon, tous vos maux ont des noms. Vous avez les épaules douloureuses ? Vous avez un 肩こり (kata-kori), mal répandu auprès des gens qui passent beaucoup de temps à travailler sur un ordinateur, assis. Vous vous êtes coincés le bas du dos ? Mon pauvre, vous avez certainement un ぎっくり腰 (gikkuri-goshi), et vous allez souffrir une bonne semaine. Et pour tous ces maux, il y a des masseurs qui vous pétrissent énergétiquement, vous font horriblement mal mais vous remettent sur pied.

Ayant des problèmes de dos (qui ne datent pas d’hier), j’ai décidé de suivre les conseils d’une collègue de travail et d’aller dans un salon de massage. J’y suis allée avec Giovanna (inséparables, je vous dis), qui souffre aussi du dos. Giovanna opte pour une heure de massage, tandis que je prends l’option « massage + acupuncture ». Comme c’est la première fois que je vais dans ce genre d’endroit, je suis un peu anxieuse, surtout à l’idée de me faire planter des aiguilles dans la nuque. Le masseur me rassure et commence par tenter de me débloquer les épaules. « Mh, vous êtes… tendue ? » Si peu… Je sens les nœuds dans mon dos à chaque fois qu’il presse quelque part et me demande si on est censé hurler STOP ou attendre que ça passe. Apparemment, il vaut mieux dire quand ça fait mal. AÏE ! Il me pose plusieurs questions étranges qui me font remarquer que je ne connais rien de mon corps, mais que les Japonais ont tendance à avoir une connaissance assez poussée de leur enveloppe charnelle et de ses problèmes. Ils savent exactement où ils ont mal, quand, dans quelle position. Ils sont capables de vous pointer les parties de leur corps qui ne vont pas bien, tandis que je ne pouvais que vaguement lui dire « J’ai mal… dans le dos… » « Quelle partie ? » « Heu… le haut ? Et le bas ? » Heureusement qu’il était particulièrement gentil et compréhensif. Je pense sincèrement qu’il était plus à même de me dire ce qui ne va pas dans mon corps après 30 secondes de palpations (bah) douloureuses. Il m’a tiré sur les bras, tenté de remettre la colonne en place (va falloir y retourner), a testé la souplesse de mes jambes (qui est apparemment étrangement développée pour quelqu’un qui a le dos aussi coincé). Le moment où il a planté cette dizaine d’aiguille dans le haut de mon cou, j’ai gentiment arrêté de bouger, respirant le plus lentement possible. « Ne vous inquiétez pas, ça ne fait pas mal ! » Je veux bien, hein, mais c’est quand même des aiguilles qui viennent se loger près de mes nerfs, je peux être un peu nerveuse, non ? D’ailleurs, la sensation des aiguilles qui appuient sur les parties crispées de votre corps est vraiment… bizarre. Vous sentez votre corps résister et en même temps se détendre petit à petit. Instant 이게 무슨 일이야 ?!

Après une heure de jen’aiaucuneidéedecequ’ilestentraindemefaire, on nous propose un thé pendant qu’on nous prépare notre carte de fidélité et qu’on nous explique les tarifs pour les prochaines séances. Cette première séance bénéficie d’un tarif spécial, vu que c’est notre première visite. 3,500y (25€) pour une heure de massage et d’acupuncture. Ma prochaine séance, prévue pour mon retour de Corée, coûtera 4,500 (32€). Je pense que c’est plutôt correct. Du coup, au lieu d’attendre à chaque fois que mon corps me dise phuque yoü, je pense que je vais y aller régulièrement et me faire défaire progressivement les tensions que j’ai dans le haut du dos. Owi.

Sinon, j’ai fini de planifier les grandes lignes de mon séjour à Séoul. Il reste encore à ajouter quelques bâtiments que mon architecte en herbe souhaite aller voir et ça devrait le faire. Je vous enverrai quelques photos ASIOC ; retrouvailles avec Constance obligent !

En attendant, à la bonne vôtre !

#34

EGALE EDUCATION

Aujourd’hui, je suis allée faire mon examen médical à l’université. Comme je ne suis pas douée, j’ai mélangé 水et木et me suis donc retrouvée à l’entrée lors d’une journée consacrée aux garçons. Dur. La dame me fait gentiment remarqué que ce n’est pas le bon jour mais que c’est le dernier, et que donc elle me laissera passer l’examen à 11h45.
J’y retourne donc, armée de tout mon courage. Pour aller à cette visite, j’ai refusé tous les soirs de la semaine d’aller manger et boire avec mes colocataires. J’ai fait des efforts, vraiment ! J’espérais donc ne pas trop me faire taper sur les doigts.
J’arrive, donc. On me demande ma carte étudiante, puis on m’imprime ma fiche à renseignements personnels. On me tend un gobelet, direction les toilettes. Tout est bien indiqué, avec des flèches et des séparations, et naturellement, des infirmières souriantes. C’est tout de même bien pratique d’avoir son propre hôpital, ça permet d’avoir tout le matériel et le personnel sous la main lorsqu’on en a besoin.
Après les toilettes, la taille et le poids. J’ai, apparemment, rapetissé de 0,5cm, je ne sais pas si je dois m’en inquiéter. En dehors de ça, mes efforts hebdomadaires ont porté leurs fruits et j’ai bizarrement perdu 4kg. Improbable, mais agréable.
Après vient l’heure de la tension artérielle. Ouuuh, instant de crispation. Après tout, lors de ma visite chez le docteur 3min, comme l’appelle Gaëtan, il m’avait comprendre que rien n’allait plus. Je me suis donc dit qu’avec les normes sévères souvent en vigueur au Japon, je devais être au bord de la mort localement. Après une première prise lamentable, le médecin tente de me mettre en confiance, me dit de respirer calmement et me fait répondre à quelques questions en attendant que ma tension baisse un peu. Non, je ne fume pas ; non, je ne bois pas tous les jours (promis) ; non, je ne suis pas enceinte ; oui, je vais bien dans ma tête ; non, je ne suis pas suivie dans un quelconque hôpital. Retour à ma tension, tout est normal. Je l’ai échappé belle.
La prise de tension est suivie de la prise de sang (aïe), puis d’un électro-cardiogramme (POURQUOI ?) et d’une radio de mes (magnifiques) poumons. On me prête un t-shirt blanc, me pose le menton sur la machine, « arrêtez de respirer » et boom, fini. Le tout n’aura duré que trente petites minutes, les étapes s’enchaînant les unes aux autres sans aucun temps d’attente. Est-ce cela, le Toyotisme (racisme) ?!
Ce qui est intéressant, c’est de voir que pour ces visites médicales, 2 jours sont consacrées aux femmes, contre 5 pour les hommes. En discutant avec un élève de la faculté l’autre jour, j’ai découvert que la raison est simple. Tôdai est fréquenté à 80 % (ou presque) par des étudiants masculins. La professeur de sociologie des migrations étant à côté de nous, je lui ai demandé pourquoi. Elle m’a répondu que c’était simple : les parents investissent plus dans leurs garçons que dans leurs filles. Ce qui peut se comprendre, quand on pense que souvent les filles travaillent, se marient, font des enfants et arrêtent de travailler. Leurs perspectives de carrière étant moins importantes et leur statut variant beaucoup selon celui de leur mari (ahum), pourquoi investir dans une fille alors qu’on peut simplement la marier à quelqu’un de bien placé ? C’est relativement rationnel, même si profondément agaçant. En plus, ça vaut le coup de bien éduquer vos filles et de les envoyer dans une université publique : ça vous coûtera moins cher ! PENSEZ-Y !

Bref, sur le chemin de mon incroyable job étudiant, je me suis également arrêtée dans un salon de massage pour tenter de faire débloquer mes épaules. Ce ne fut pas chose facile. N’ayant pas énormément de temps, j’ai demandé 10min (1000y). Je me suis assise sur la chaise de massage et le monsieur a commencé à triturer mes épaules. Et là, c’est le Drame ! Oh mon dieu, mais c’est que ça fait mal samère ! Il a passé énormément de temps sur mon épaule gauche, complètement bloqué, en me posant régulièrement des questions.
« Qu’est-ce que vous faites comme travail pour être aussi crispée ? »
« Je suis… étudiante… »
« Vous êtes étudiante et vous êtes déjà aussi crispée ? Mais qu’est-ce que ça va être quand vous allez avoir un travail ? »
« Je me le demande bien… »
« Vous êtes vraiment… crispée… Ca va, vous n’avez pas trop mal ? »
Non, j’ai juste envie de pleurer toutes les larmes de mon corps actuellement, mais tout va bien. J’y ai d’ailleurs laissé une bonne partie de mon maquillage, mais tant pis. J’ai vraiment eu l’impression que chaque partie de mon corps que ses mains touchaient se mettaient à chauffer puis à picoter et enfin, à faire horriblement mal. Une vraie torture. Mais c’est vraiment intéressant de voir à quel point la première fois ça fait mal, puis quand il revient sur une partie qu’il a déjà massée, ça fait de moins en moins mal. Je suis toujours méchamment coincée, surtout dans le bas de mon dos, mais c’est un début. Après tout, quand j’étais allée voir l’ostéopathe à Lille, j’avais aussi dû y aller 2 fois une heure pour que ça fasse effet et que mes douleurs dans le dos s’estompent. Je suis donc encore loin d’un résultat satisfaisant. De fait, je vais retourner faire faire un massage de la mort qui tue avec Gio ce samedi ou la semaine prochaine. Parce que je n’ai rien d’autre à faire, naturellement. Ahum.

Sur ce, je m’en retourne à mes traductions diverses et variées.
A la bonne vôtre.

#33

SANS REGRET

Samedi dernier, nous avons organisé une soirée sur le toit de la maison. Le résultat a été moins spectaculaire que la soirée qui avait été organisée il y a un an, mais c’était tout de même convenable. J’ai cuisiné plus de 3h avec Ken, tandis que les gens préparaient des takoyaki et installaient la machine à faire tourner les sômen (ça ne sert à rien, mais vous savez, les Japonais et les gadgets…). Je pense personnellement que malgré le stress, la soirée s’est plutôt bien passée. Tout le monde avait invité des amis et nous sommes presque (à 2000 yen près) rentrés dans nos frais.
ET POURTANT !
Vers 22h, je vois des gens commencer à ranger. Ca a donné l’impression que la soirée était belle et bien finie et que les invités devaient penser à rentrer. Effectivement, lorsqu’on regarde l’event facebook, l’heure de fin de la soirée est à 22h. Quand on se dit qu’on a commencé à 16h, ça fait quand même 6h, mais bon… une soirée qui finit à 22h, c’est étrange quand on a l’habitude des soirées qui commencent à 22h. Bref, je vois Yûta et Ken qui commencent à s’activer et je me dis que c’est quand même dommage de finir comme ça. Surtout qu’après 2kg de nounours imbibés à la vodka, nous n’avions pas trop la tête à ranger. Nous allons chercher quelques bouteilles qui avaient DEJA été rangées et continuons à discuter sur le toit. Un serveur d’un bar nous a fait des signes de main, Tarô, Yûki et Gio ont fait le grand écart, tandis que d’autres discutaient. Seulement, Ken et Yûta continuaient de ranger en bas. Et à la fin de soirée, Ken a jeté l’éponge en disant que si l’organisation était aussi mauvaise, il ne viendrait plus jamais aider.
De fait, Yûta nous a tous appelés vers 23h30 pour faire un briefing. En japonais, on appelle ça un 反省会 (hanseikai), une réunion d’évaluation. C’est quelque chose de très fréquent. J’ai d’ailleurs mon dernier cours de japonais qui servira à faire le bilan du semestre et à discuter des points négatifs à améliorer. Seulement, c’est la première fois de ma vie que je fais une réunion pour connaître les points négatifs d’une soirée ‘privée’. Quand on organise un event dans une association ou dans une entreprise, je comprends qu’il faille évaluer l’organisation, mais quand on a simplement fait une soirée chez soi… n’est-ce pas faire preuve d’une peu trop de zèle ? Nous nous retrouvons donc au salon du 5e étage, tous plus ou moins frais (rappelons-le, 2kg de nounours alcoolisés). Yûta commence à nous expliquer que Ken était très mécontent et nous demande ce que nous en pensons. Gio, clairement atteinte par le Haribo++, explique longuement en quoi la soirée était sympathique et que nous n’avions pas besoin de nous lamenter à une heure aussi tardive. Certes, son côté latin prend le dessus et elle parle trop, mais elle n’a pas tort. Quel est l’intérêt de rassembler des gens sur le point d’aller finir la nuit au karaoké pour leur demander ce qui n’allait pas dans la soirée ? Après plus de 30 minutes (interminables), on parvient à la conclusion (évidente) qu’il faudra mieux répartir les rôles la prochaine fois. Je ne peux m’empêcher de faire remarquer que la personne la plus concernée par les problèmes de la soirée, Ken, est déjà rentrée (dernier train oblige) et que de fait, la réunion aurait pu attendre le lendemain.
Je comprends tout à fait leur envie de faire une soirée parfaite, où tout le monde serait satisfait à la fin. Je comprends de fait qu’il est important de mettre en place une organisation efficace de manière à ne pas laisser une personne s’occuper de tout et être épuisée à la fin. Mais le fait que nous étions une majorité d’étrangers, non habitués à discuter des mérites et démérites d’une soirée alcoolisée avec 3g dans le sang, n’a pas dû aider. Cette réunion n’a fait que nous agacer et nous rendre maussade, alors que nous venions de passer une excellente soirée avec des gens fort agréables. Il est intéressant de faire le point, mais je crois que les 反省会ne sont pas ma tasse de thé. Heureusement que le karaoké nous a permis d’aller nous cacher le cœur un peu plus léger*. Sinon, je ne vous dis pas la tête que j’aurais fait au fond de mon lit.
M’enfin, notre prochaine soirée sera donc encore plus canon que celle-ci. Mais pour en voir le résultat, il faudra attendre la fin de la saison des pluies !

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*Et d’ailleurs, je prépare activement mon voyage à Séoul en ne chantant plus que des chansons en coréen. BG ou pas BG ? (… qui me rappelle le classique « BIEN OU BIEN ?! »)